#Méditation : Comment faire face au trio infernal...

Méditation, le guide essentiel (4/4) : Comment pratiquer durablement la méditation ?

Après avoir subi la torture dans son pays occupé, l’abbé tibétain Phakyab Rinpoché se réfugie à New York en avril 2003. Il est hospitalisé d’urgence pour une gangrène sévère au pied droit. Alors que les médecins préconisent une amputation immédiate, le moine refuse de se couper de cette partie de son corps si précieuse pour sa pratique du yoga et la circulation de son énergie. Il quitte alors l’hôpital et s’installe dans un appartement où pendant 3 ans, il médite de manière particulièrement intense pour guérir. Il réalise alors l’impossible : il repousse l’infection et reconstruit les os de sa cheville… par sa pratique méditative ! La médecine classique estime que seule une greffe osseuse aurait pu avoir le même effet. Sa méditation l’a sauvé !

Des exemples de ce type existent par centaines et attestent que la pratique de la méditation peut avoir des effets extraordinaires pour tous… quand elle est pratiquée de manière quotidienne et profonde ! C’est l’objet de ce dernier article de notre guide essentiel pour méditer.

Après avoir défini la méditation (article 1), expliqué les bases pour commencer sa pratique (article 2), exploré une séance complète de méditation profonde (article 3), il est maintenant temps de répondre à la dernière question dont dépendent les bénéfices à long terme de cette pratique : « Comment réussir à faire de la méditation un rituel durable ? »

  • Combien de temps doit-on investir dans cette pratique pour bénéficier de ses effets (sans forcément avoir une gangrène à guérir bien-sûr) ?
  • Comment trouver ce temps dans nos emplois du temps surchargés ?
  • Comment faire face à notre propre pensée, nos douleurs et autres démangeaisons qui déséquilibrent notre concentration ?

Je vous partage les réponses que j’ai accumulées dans mes différents voyages et formations…

 

PARTIE 4 – Quelques clés pour réussir à pratiquer au mieux dans le temps

À propos du temps de méditation

Combien de temps dois-je investir dans cette activité pour en sentir les bénéfices ?

Pour se relaxer, 1 minute peut suffire. Mais pour améliorer durablement sa concentration et bénéficier de tous les apports de cette pratique, il faut être prêt à s’accorder un peu plus de temps… Comme dans toute activité où l’on souhaite des résultats d’ailleurs !

J’ai posé cette question du temps nécessaire pour méditer à mon professeur en Inde. La réponse qui m’avait été donnée lors de ma première formation en MBSR (voir article 1) était qu’en deçà de 45 minutes, la méditation n’avait que peu d’effets à long terme… Assez décourageant.

Sa réponse fut tout autre : La durée de méditation importe moins que sa profondeur.
« Il vaut mieux méditer 15 minutes et atteindre une concentration profonde que passer 45 minutes assis avec un esprit qui divague ! » En somme, une clé pour réussir à méditer durablement est de savoir sortir de sa méditation si la clarté n’est pas au rendez-vous malgré l’application des techniques… Méditer donc moins longtemps… pour réussir à méditer plus longtemps dans le temps ! Paradoxal non ?

Ça m’a beaucoup marqué. Les 3 années précédentes, j’avais pratiqué irrégulièrement en me répétant sévèrement en boucle « Il faut que je tienne les n minutes ! Il faut que je tienne les n minutes ». Résultat : je sortais de chaque méditation frustré en regardant l’heure, ancrant ainsi une émotion désagréable à ma pratique. Cela m’a amené à abandonner plusieurs fois…

La stratégie pour trouver le « bon timing » consiste donc à définir une durée de pratique idéale et réaliste vis-à-vis de son emploi du temps habituel. Puis lors de sa méditation, rester à l’écoute de ses limites et savoir en sortir avant de « perdre son calme » (et ce sans se juger négativement !) De cette manière, on revient plus volontiers le lendemain à son coussin de méditation, le surlendemain aussi, etc.

Ok ! Je suis prêt à mettre 7 minutes tous les jours, c’est suffisant ?

C’est un bon début pour tester la méditation. Mais pour obtenir des résultats en profondeur, misez plutôt sur un minimum de 15 minutes 1 à 2 fois par jour (tout en gardant en tête la stratégie ci-dessus !).

Un simple quart d’heure… Ça peut paraître facile à première vue. Mais ça se transforme souvent en véritable mission impossible dans la pratique ! En effet, sitôt la bonne résolution posée, les obstacles du quotidien nous tombent dessus les uns après les autres, et petit à petit la durée de méditation se délite et s’amenuise, jusqu’à disparaitre…

mission-15-min-impossible

Comment instaurer un rituel durable ?

Il n’y a pas de « méthode universelle » pour mettre en place ce genre de rituel. Chacun est différent dans ses besoins, envies, capacités… C’est donc à chacun d’expérimenter et de créer le système qui lui conviendra le mieux en fonction de ce qu’il désire profondément ! Voici néanmoins quelques astuces qui m’ont beaucoup aidé pour mettre en place le mien et qui peuvent être vos alliées pour définir le votre…

Astuce n°1 : Choisissez un moment tranquille de votre journée pour votre médiation quotidienne. Évitez les moments qui précèdent un impératif immédiat susceptible de vous déconcentrer. Exemple vécu : Méditer avant de partir travailler le matin… qui s’est vite transformé en « Méditer un matin sur deux car chuisenretard« ) . Après avoir fait divers essais, je teste depuis quelques semaines la méditation le matin juste après le réveil. C’est une manière douce d’entrer calmement dans ma journée… sans qu’aucun email ou autre notification ne m’ait encore dissipé ! C’est le meilleur moment que j’ai identifié pour ma pratique.

Astuce n°2 : Trouvez d’autres personnes pour pratiquer avec vous ! La motivation est un phénomène social : si vous flanchez, vos proches seront là pour vous motiver et vous rappeler votre engagement ! En couple, c’est idéal !

Astuce n°3 : Ritualisez votre pratique : Même endroit, même heure, même processus ! Vous le savez peut-être, le rituel est l’un des fondamentaux de la transformation personnelle auquel j’accorde énormément d’importance. La répétition quotidienne crée en effet des habitudes durables et permet d’améliorer sa pratique de manière régulière. À chacun de créer les déclencheurs qui conviennent : Ajouter un rappel dans son agenda, avoir son matériel à proximité… Pour ma part, le banc de méditation est à côté du lit et je me réveille 1h45 avant de partir le matin pour avoir tout le temps nécessaire à chacun de mes rituels.

Astuce n°4 : Pendant votre pratique, utilisez une application ou un réveil pour ne pas avoir à vous occuper du temps pendant la séance. J’utilise notamment l’application Mindfulness sur iOS qui me permet d’enregistrer des séances personnalisées avec des répères temporels dans la méditation (ex : un gong toutes les 10 minutes).

Astuce n°5 : Une fois votre quart d’heure régulier instauré, vous pourrez séance après séance augmenter petit à petit ce temps. Mon professeur recommande pour cela de doubler la durée de sa pratique une fois par semaine. De cette manière, vous pouvez expérimenter des sensations plus profondes et repousser votre limite de concentration semaine après semaine.

Voilà ! Vous avez désormais tout mon savoir quant à la gestion du temps en méditation… Passons maintenant aux autres difficultés qui vous attendent au tournant…

 

Auto-pression et déconcentration : reconsidérer les freins de la méditation

Le plus grand adversaire lors de notre méditation, c’est nous-même ! Mais nous allons voir qu’avec quelques changements de perspective, nous pouvons remédier aux principales difficultés de la pratique en profondeur.

Quel objectif donner à notre méditation ?

Vous entendrez parfois : « En méditation on ne doit pas avoir d’objectif ». C’est un sujet particulièrement mis en avant en Mindfulness… Et en bon normand, je ne peux m’empêcher de vous dire que c’est à la fois faux et vrai !

C’est pour moi faux de manière générale en Occident. En effet, nous autres européens avons forcément un objectif en tête lorsque nous commençons la pratique de la méditation : dissiper notre stress, gagner en sérénité, nous rapprocher du divin… : dans notre culture, nous ne méditons pas « pour méditer ». Et si c’était vraiment le cas, nous finirions par nous assoir devant la télé, car franchement, c’est moins difficile.

Néanmoins, cette affirmation prend tout son sens si nous considérons nos attentes pour chacune de nos méditations. Prenons un exemple : Si nous nous fixons un objectif précis (disons « entrer en Pleine Conscience » ou « atteindre tel état de sérénité »), nous focalisons alors notre esprit sur ce but et il nous accompagne tout au long de notre séance… occupant dans notre conscience la précieuse place qu’il nous faudrait justement libérer pour réussir à nous concentrer sur notre objet de méditation ! C’est ce que je fais encore parfois malgré moi. Résultat : je ne parviens pas à entrer en concentration profonde et ressens une légère frustration lorsque sonne la fin de la séance.

La clé pour méditer profondément dans sa séance est donc de ne pas se fixer d’attente particulière. Suivez plutôt le processus de votre choix et voyez là où il vous amène, sans pression. Votre concentration variera en fonction de votre état de stress, de fatigue, etc. C’est normal. Soyez indulgent envers vous-même. L’important c’est de pratiquer. Les résultats se mesurent au long cours !

Douleur, démangeaison, pensée : faire face au trio infernal

Vous méditez donc sans objectif… Sereinement… Profondément… En toute immobilité… Quand tout-à-coup, votre corps et votre esprit décident de s’en mêler et invitent l’un ou l’autre de vos ennemis jurés :

  • la fameuse douleur aigüe qui vous saisit sans prévenir,
  • son illustre cousin, la démangeaison subite d’une de vos extrémités,
  • et enfin le plus coriace de ces adversaires : votre propre pensée qui décide subitement que « maintenant, on change de sujet ! »

#Méditation : Comment faire face au trio infernal...

Ces manifestations du corps et de l’esprit sont particulièrement perturbantes dans notre exercice. C’est pour cette raison que je vous ai partagé dans les 2 derniers articles les positions et méthodes qui existaient pour apaiser l’esprit et éviter au maximum que votre corps vous dérange durant vos séances. Néanmoins, cela arrivera car… cela fait partie de la méditation  !

Les bienfaits de la « déconcentration »

Nos pensées « intempestives », douleurs et autres démangeaisons peuvent être vues comme des empêcheuses de tourner en rond…. ou comme des entraineuses  ! En effet, Méditer, c’est entraîner son esprit à se concentrer à l’extrême pour entrer en méditation. Et dans cet entraînement musclé, les haltères, ce sont justement vos pensées parasites et tous vos autres facteurs de déconcentration !
En vous entraînant encore et encore à les observer calmement et à les dissiper, vous apprenez à vous concentrer de manière rapide et efficace. C’est cette faculté qui vous permet(tra) de réagir différemment face au stress et aux émotions de la vie de tous les jours !

Comment dissiper nos «  dissipations  » ?

La première chose à faire lorsque surgit une pensée, une douleur ou une démangeaison, c’est de rester tranquille et « observer » le phénomène. Ça peut paraître contemplatif, et ça l’est d’ailleurs complètement !
La méditation invite à prendre du recul par rapport au moment présent sans pour autant émettre de jugement sur soi ou lui, ni se faire mener par le bout du nez par la situation. Le trio infernal est l’occasion ultime pour s’entrainer à ça… sans ni bouger, ni abandonner !
 

Douleurs

Pour faire face sereinement à une douleur, vous pouvez prendre un temps et explorer les sensations suivantes : Où se situe la douleur ? Comment ressentez vous son action ? Comment la caractériseriez-vous ? (Est-ce chaud ? Froid ? Piquant ? Lancinant ? etc.) Est-elle diffuse ou précise ? Immobile ou en mouvement ?
Tout en l’observant ainsi, vos sensations vont évoluer et vous la vivrez de manière plus détachée.

Astuce : Contempler sa douleur, c’est bien, mais la dissoudre, c’est encore mieux ! En respirant lentement et profondément et en amenant le souffle et votre attention sur la zone, vous pouvez atténuer et même faire complètement disparaitre la sensation de douleur. Visualisez pour cela à l’inspiration une grande lumière blanche et chaleureuse qui se propage par votre souffle jusqu’à la zone douloureuse. Imaginez alors toute la douleur ressortir dans un nuage sombre à l’expiration. Après quelques respirations, vous sentirez la différence !
 

Démangeaisons

L’idée est la même que pour la douleur. En vous concentrant sur la sensation sans bouger ni succomber à la furieuse envie de vous gratter, vous aller la voir disparaitre petit-à-petit. Si celle-ci grandit et devient insupportable, sachez que comme pour la douleur, l’idée n’est pas de se mortifier ! Le concept, c’est de prendre le temps d’observer le moment présent avant de se laisser entraîner par sa réaction spontanée. Si la réponse qui vous apparait après ce temps implique grattement ou mouvement, faites-le !

Petite anecdote en passant : dans la pratique zazen, un moine serait présent dans votre dos avec un bâton, prêt à vous frapper les épaules au moindre écart de ce genre afin de vous remettre dans le « droit » chemin ! Profitez-donc avec conscience de vos écarts ! ;-)
 

Pensées

C’est le membre du trio le plus coriace pour moi, les autres m’ayant laissé tranquille depuis quelques temps… Ici encore, l’idée est d’observer ses pensées. Comment ? En la regardant « sans la suivre ».
C’est comme si chaque pensée était le wagon d’un train qui défile devant vos yeux : Lorsqu’une pensée surgit, elle captive inévitablement votre attention, et vous regardez alors ce nouveau wagon. Vous vous perdez dans les détails de son fuselage, ses fenêtres, les personnes derrière la vitre, etc. Mais très vite, vous vous rendez compte que vous avez quitté votre méditation (et que vous observez un wagon). À ce moment, vous décidez alors de laisser le wagon passer sans le suivre ni passer au suivant, et ramenez délibérément votre attention à la respiration.

Si votre mental est particulièrement agité, nous avons vu quelques exercices dans l’article 3, et notamment la respiration en U qui permet de l’apaiser. Vous pouvez l’utiliser à volonté dans votre pratique, ou bien même utiliser une nouvelle…

Astuce : J’ai découvert en Thaïlande cette méthode dans un livre destiné aux moines bouddhistes. Elle consiste à effectuer le cycle inspiration-expiration le plus long possible. Inspirez donc le plus lentement et le plus longuement possible, jusqu’à ce que votre corps soit rempli d’air à son maximum. Puis expirez alors de la même manière jusqu’à ce que vous n’ayez plus aucun souffle. Si vous vous souvenez bien du dernier article, le flux de notre mental est directement relié au flux de notre respiration. Avec cet exercice, vos pensées vont donc vite se dissiper !

Et si ça ne marche pas ?

Si malgré les conseils ci-dessus, vous n’obtenez pas la sérénité que vous recherchez, souvenez-vous de la stratégie du « bon timing » en début d’article : il est peut-être temps de vous arrêter pour aujourd’hui.

 

Quelle place pour la discipline ?

Discipline

Nous venons de le voir, pour s’entraîner à ne plus « « se perdre dans ses pensées », la méditation requiert de la discipline. Et cette discipline peut déranger. « Il faut le sentir, se laisser guider par son intuition… » pourrez-vous entendre ou lire…

C’est vrai… sauf quand on débute ! C’est d’ailleurs la même chose dans chaque art (art martial, art culinaire, art scriptural, art spirituel…) : lors de ses débuts, l’élève suit scrupuleusement le maître pour acquérir le geste. Avec les années de pratique et de répétition, il l’intègre et devient alors apte à laisser son instinct et son imagination parfaire ou transformer l’activité. Pour ma part, je n’en suis pas là et ai encore de belles méditations devant moi à approfondir et répéter le geste que je vous ai présenté…

Autodiscipline -vs- Plaisir

Peut-être vous sentez vous alors découragé face à cette discipline qui peut apparaître « rigoriste ». Peut-être que la méthode que je vous ai partagé dans l’article 3 ne vous convient pas. C’est fort possible et nullement un problème ! Il existe une infinité de manières de méditer ! Vous finirez par trouver la pratique qui vous convient. En voici quelques unes que vous pouvez envisager :

  • l’exploration du corps par le bodyscan en profondeur (en reprenant la méthode décrite dans l’article 3 mais allongé(e) et sur une plus longue durée),
  • le yoga (notamment le « hata yoga » qui marie l’art de respirer avec l’harmonie des mouvements),
  • le qi gong,
  • le tai chi,
  • le chant en Pleine Conscience,
  • la marche en Pleine Conscience,
  • la méditation transcendentale (par psalmodie de mantras),

Ces exemples sont des activités amenant à une méditation « formelle », c’est-à-dire cadrée. Mais vous n’êtes pas limité(e) à un cadre ! Toute activité peut mener à la méditation profonde si vous concentrez l’intégralité de votre attention dans ce que vous faites et uniquement dans ce que vous faites. C’est ainsi que certaines personnes vont diront que vous pouvez méditer en vous lavant les dents ou en épluchant des carottes ! J’avoue pour ma part n’avoir jamais essayé d’atteindre la Pleine Conscience avec la brosse-à-dents dans la bouche… Toujours est-il que si cette activité vous apporte profondeur, calme et plaisir, c’est sans doute celle qu’il vous faut !

Pour persévérer dans le temps et faire de la méditation une habitude durable, la clé réside donc dans un savant équilibre entre discipline et plaisir ! Et il n’y a que vous qui pourrez le trouver…

 

En conclusion

Vous voilà avec un beau bagage sur l’art de la méditation. Si je devais résumer les 3 clés principales à retenir, je dirais :

  • Appliquez la méthode qui marche pour vous au quotidien,
  • N’ayez pas d’attentes particulières lors de votre pratique,
  • Observez de manière compréhensive vos limites et recherchez toujours l’équilibre entre discipline et plaisir…

J’espère que tous ces conseils pourront vous aider à avancer sur votre chemin et vous rapprocher d’une seule et unique pensée : « Je me sens bien »…

Reste à savoir ce que vous allez faire de toute cette connaissance maintenant. En effet comme le dit Christophe André, la méditation, c’est comme le vélo : l’idée de rouler peut être plaisante… Mais la seule manière d’en ressentir les bienfaits, c’est de mettre le pied sur la pédale et de se lancer !

Alors, n’hésitez pas : (Re)consultez l’article 3 de ce dossier pour vous lancer, partagez en commentaire vos questions, appréhensions, mais aussi vos propres conseils pratiques ! Je vous souhaite d’excellentes méditations !

 


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